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Introduction à la voltige  2/7

 

L’histoire de la voltige en parapente

Aujourd’hui nous avons des pilotes reconnus comme des athlètes de haut niveau avec une équipe de France de voltige, des champions de France, des champions du monde, un budget fédéral, du matériel spécifique et des sponsors… Mais cela n’a pas toujours été le cas et il aura fallu de longues batailles et l’investissement de quelques personnes pour en arriver là.

Savoir d’où l’on vient permet de mieux comprendre ce que nous sommes aujourd’hui.

Voici donc un chapitre important sur le plan de la culture du vol libre.

Dès le début du parapente, des pilotes ont eu envie de jouer avec leurs ailes pour le plaisir, à la recherche de sensations fortes et du contrôle de leur voile…

 

De 1978 à 1988 : les cascadeurs !

Jusqu’en 1986, les pionniers du parapente ont déjà beaucoup à faire pour parvenir à décoller et atterrir proprement. Les performances des ailes de parachutisme utilisées à l’époque ne permettent pas de s’éloigner beaucoup du relief (finesse inférieur à 2 !). Les vols ne durent que quelques secondes et on ne pense même pas à ”faire le fou”, l’activité procurant déjà beaucoup d’adrénaline.

Puis des ailes spécifiques au parapente permettent de s’éloigner du relief, et même d’exploiter les ascendances. Le matériel reste néanmoins très proche des parachutes et permet de faire presque n’importe quoi sans risquer de tomber dans sa voile. Il est alors possible de réaliser un décrochage complet de l’aile et de relâcher à n’importe quel moment : l’abattée consécutive ne nécessitant aucun contrôle. Le décrochage est d’ailleurs enseigné dès les premiers vols en école. Certains pilotes commencent à s’amuser. On parle d’acrobatie, mais je parlerais plutôt de cascades !

Dans l’excellent film ”Super Max” tourné à Verbier en Suisse on peut voir Philipe Bernard jouer les cascadeurs: crash volontaire dans la neige, collision avec une montgolfière, atterrissage dans les arbres et gamelles en tout genre !

Vidéo: quelques extraits de Super Max, un film culte !

 

Quelques années plus tard, voici ”Super Max 2”, avec des ailes déjà plus avancées… On retrouve cet esprit de cascadeur mais pour la première fois on voit des manœuvres effectuées en vol : décrochages, vrilles, et autres fermetures. Ces vols sont filmés au dessus du Léman, depuis le site de Sonchaux qui accueillera quelques années plus tard les premières compétitions de voltige.

Vidéo: Une scène culte dans Super Max 2.

Vous pouvez retrouver les films en entier ici et .

 

De 1989 à 1996 : une forme de pratique interdite !

A partir de 1989, on s’aperçoit qu’il ne faut plus faire n’importe quoi avec une aile de parapente et qu’il est possible de tomber dans sa voile.

Vidéo: chute dans la voile suite à un décrochage mal maîtrisé.

Le décrochage devient mal vu et même interdit.

Les homologations des ailes ne testent pas cette manœuvre considérée comme trop dangereuse.

Le monde du parapente se passionne alors pour les vols de durée et la distance qui devient la seule expression du haut niveau en parapente.

Les ailes évoluent vers davantage de plané mais le mot pilotage ne fait pas partie du vocabulaire des pratiquants.

Néanmoins, d’excellents pilotes développent un style de vol acrobatique. Le suisse Andy Ediger, les français Michel Werly, Christophe Waller, Sébastien Bourquin, Richard Gallon ou encore l’autrichien Mike Kung.

Mais cette forme de pratique ne plaît pas !

La FFVL recommande à son équipe de haut niveau de ne pas pratiquer d’ ”acro” car ce n’est pas l’image qu’elle souhaite donner à notre sport.

Pourtant, dès 1994, Sébastien Bourquin prétend voler en marche arrière et contrôler le décrochage sans risquer de tomber dans sa voile. Il passe pour un fou, et tous les aérodynamiciens lui expliquent que ce n’est pas possible de voler en marche arrière. Le monde du parapente perd l’opportunité de réfléchir à cette manœuvre et de bénéficier de l’expérience de ces athlètes.

Je me souviens de cette époque où l’on me criait dessus “va te tuer ailleurs !” lorsque je m’amusais près d’un décollage. Je passais pour un fou et même pour un voyou pratiquant une activité considérée comme illégale.

 

1996 – 1997 : Le retour de l’ ”acro”

En Suisse, Andy Ediger et Hannes Arsh créent le ”Redbull Acro Team” et réalisent des films et démonstrations.

 

Durant les hivers 1996 et 1997, à Villars sur Ollon (une station de ski dans le canton de Vaud en Suisse) se déroule le ”Redbull Par’Acro”. A l’époque l’affiche annonce :  “L’unique compétition de parapente acrobatique au monde”.

Les pilotes évoluent au dessus de la neige en réalisant des évolutions freestyle et sont notés par un panel de juges. Cette compétition ne fait pas l’unanimité et compte bon nombre de détracteurs… Pourtant, cette forme de pratique commence à motiver de plus en plus de pilotes et il devient évident que cela peut être une pratique visuelle et médiatique.

A l’époque, les manoeuvres sont le décrochage, la vrille, les wing-over, 360 asymétriques et inversions.

 

1996 : Le début de la reconnaissance en France

Sous l’impulsion de quelques pilotes en quête de reconnaissance dont Gregory Blondeau et moi-même, la FFVL finit par admettre l’existence de cette forme de pratique élitiste. Elle préfère parler de voltige plutôt que d’acrobatie. Mais certains problèmes se posent, notamment concernant le matériel. Par exemple la manœuvre du décrochage, considérée par les pilotes comme une manœuvre de base, n’est pas homologuée et même interdite par les constructeurs dans les manuels d’utilisation.

 

1997 – 1998 : Les premières compétitions au dessus de l’eau

En 1997, sous l’impulsion d’Alain Zoller, et pour la première fois, une compétition de voltige est organisée au dessus de l’eau avec un atterrissage sur un petit radeau : le “Redbull Sky Glide” à Villeneuve en Suisse. Le règlement est grossier, les juges ne sont pas formés, et les pilotes se cherchent. La première année, Alain Zoller souhaite une compétition en ”synchro” (vol synchronisé par équipe de deux). Mais les pilotes, non entraînés, se rebellent et la compétition se déroule finalement en individuel.

Voici quelques images de la compétition de 1997 :

 

 

En 1998 la compétition se déroule en synchro. En 1999, la compétition n’a pas lieu.

1998 voit également la naissance d’une autre compétition, en Italie, à Marcesine sur le lac de Garde : le trophée Nafta Watch : parapente acrobatique et précision d’atterrissage. Mais chaque évènement utilise son propre règlement. Les juges sont des journalistes, des pilotes locaux, des élus de différentes fédérations, mais en aucun cas des spécialistes.

 

1999 : première ”compétition” en France

Durant l’hiver 1999, la station de ski de Vars dans les Hautes Alpes accueille les YOZ Mad Masters organisés par la chaîne de télévision Eurosport, un rendez-vous des sports de glisse extrême : free ride, freestyle, vitesse, escalade et… parapente acrobatique !

Il s’agit alors de la toute première compétition de voltige en parapente reconnue et organisée par la FFVL. Les évolutions se font au dessus des pistes de ski. Les pilotes sont sélectionnés, le décrochage est interdit mais, chose insolite, le jury impose des vrilles.

Ci-dessous: article du Dauphiné Libéré du 5 avril 1999.

A l’époque, les pilotes doivent se munir d’une autorisation spéciale et nominative des constructeurs pour les autoriser à pratiquer la voltige avec leur voile et sortir ainsi des préconisations inscrites dans les manuels d’utilisation.

 

L’équipe SAT

Dans ces années, je suis à la recherche de l’été permanent ! Pour un pilote de parapente passionné, l’hiver est une saison trop triste ! De même que certains oiseaux vont chercher un climat plus doux dans l’hémisphère sud, je migre plusieurs mois en Amérique du sud pour vivre deux étés par an ! C’est ainsi que, au fil des voyages, je noue avec d’autre pilotes partageant le même style de vie, des relations amicale profondes : les frères Raùl et Felix Rodriguez, mais aussi Richard Gallon. A force de partager des expériences communes, nous décidons de former une équipe afin de partager le savoir-faire de chacun, décortiquer les manœuvres d’ ”acro”, et réaliser des démonstrations. Après un brain storming, nous convenons de donner le nom de SAT à notre équipe : le Safety Acro Team était né.

 

1999 : La manœuvre SAT

En décembre 1999, en Colombie, Raùl Rodriguez découvre une nouvelle manœuvre qui va révolutionner la voltige.

Comment la SAT fut elle découverte ?

A cette époque, Raùl vole sous une UP Summit (modèle qui ne passe pas la manœuvre SAT) et s’amuse à entrer en vrille depuis un 360 afin de conserver une rotation pendulaire dans la vrille, comme le faisaient les pilotes du RedBull Acro Team. Il change alors de voile et passe sous une Edel Millénium. À force de répéter cette manœuvre, il découvre qu’il est possible d’entrer dans une rotation particulière sans que la voile ne parte en vrille. ”J’ai découvert une nouvelle manœuvre !” me dit-il. On parlait alors de ”la maniobra” (la manœuvre)… Et dans l’année qui suit, Raùl décide de nommer cette manœuvre du même nom que le team : la manœuvre SAT !

Vidéo : comment Raul inventa la SAT

 

Comment la SAT révolutionna la voltige 

Lors de sa découverte fin 1999, Raul prétend ”Avec ça, il est possible de faire le tumbling ! ”… En effet, si l’on rentre en SAT depuis une inversion de 360, la rotation SAT devient asymétrique : l’axe de la rotation n’est plus vertical, mais horizontal. La voile passe sous les pieds du pilote en consommant l’énergie accumulée dans la prise de vitesse. On parle de SAT asymétrique. En affinant la technique de rentrée et le pilotage de la rotation, il est possible de réaliser le tumbling… puis, dès 2004, l’Infinity.

 

2000 à 2006 : La folle épopée de la voltige

Entre 2000 et 2006, le monde de la voltige évolue de manière impressionnante. De nouvelles manœuvres apparaissent chaque année et on voit arriver les toutes premières voiles conçues spécialement pour la voltige.

En l’an 2000, la compétition de Villeneuve revient sous le nom de Redbull Vertigo. Cette année, je suis blessé et je ne peux participer en tant que pilote. Je décide donc de me joindre au panel de juges en appliquant le règlement ”brut de décoffrage” de l’époque. Je me rends compte qu’il y a tout à faire ! Et je me lance dans la rédaction d’un nouveau règlement avec des critères d’évaluation plus précis pour les années suivantes. Le but étant de définir les manoeuvres et leurs critères d’évaluation afin que chaque compétiteur sache sur quoi et comment il sera noté afin de pouvoir s’entraîner en toute connaissance de cause.

C’est ainsi que les compétitions de voltige se structurent.

Des juges sont formés et d’autres compétitions voient le jour en utilisant le même règlement avec, par exemple, Acro Aria à Omegna en Italie, sur le lac d’Orta.

En 2002, on peut voir des Hélicoptères, SAT asymétriques, Tumblings, mais aussi Mac twist et Misty Flip. On voit même l’apparition des premières Rythmiques SAT.

Vidéo  “Vertigames” : l’excellent film de Guillaume Broust réalisé lors du Red Bull Vertigo de 2002.

 

2003 : Reconnaissance de la voltige au sein de la FAI

En 2003, un français, Olivier Burghel président de la CIVL (la partie vol libre de la FAI) décide de se lancer dans la reconnaissance de la discipline voltige par la FAI. L’objectif est alors de pouvoir un jour réaliser les premiers championnats du monde de voltige. La tâche n’est pas simple car il faut changer les mentalités et convaincre l’ensemble des fédérations que la voltige peut être une discipline à part entière et qu’elle mérite une reconnaissance.

En attendant la venue des premiers championnats du monde, le circuit des compétitions s’élargit et la FAI lance un classement permanent des pilotes de voltige.

 

2003 : Première vraie compétition de voltige en France :

Sous l’impulsion de Jean-Michel Sangeoire, une compétition respectant le règlement de voltige de la FAI est organisée en France au dessus du lac d’Aiguebelette : Acrolac.

 

2003 premier Waga Festival

Le Parateam Club de Saint-Hilaire du Touvet organise la première compétition de waga sur la dune du Pyla.

Une compétition unique en son genre !

Vidéo: extrait du film du premier waga festival

Retrouvez l’intégralité du film et d’autres vidéos du Waga Festival sur le site du Parateam: ici.

 

2004 : Raul Rodriguez réalise l’Infinity tumbling.

Fin 2004 lors de la compétition Acro Andes à Salta en Argentine, Raùl présente officiellement et pour la première fois la fameuse manoeuvre de l’Infinity tumbling. Sa technique et son prototype de voile ne sont pas encore totalement au point !

Vidéo : les premiers Infinitys en compétition… Les images sont de mauvaise qualité mais elles montrent bien le mental qu’il aura fallu à Raùl qui finira dernier de la compétition !

 

Quelques mois plus tard, sa voile et sa technique sont au point !

 

2005 : Premiers championnats de France !

AcroLac 2005 consacre Antoine Montant premier champion de France de voltige en parapente.

 

2006 : Premiers championnats du monde !

Le Redbull Vertigo de 2006 accueille les premiers championnats du monde.

A cette occasion la FFVL constitue sa toute première équipe de France de voltige en parapente.

La compétition se déroule sur 10 jours avec une catégorie “individuel” et une catégorie “synchro”. Une foule immense s’entasse pour admirer la compétition et toutes les animations. C’est une des plus belles vitrines de l’activité vol libre jamais réalisées. Pour juger chaque manche il n’y a pas moins de 6 juges de différentes nationalités. Pour ma part je suis le directeur des juges.

L’espagnol Raul Rodriguez est consacré 1er champion du monde de voltige en parapente de l’histoire. 2ème le français Antoine Montant. 3ème l’espagnol Felix Rodriguez.

Il faudra attendre 10 ans avant de revoir des championnats du monde.

 

2006 – 2016 : Une activité de plus en plus élitiste

Depuis 2006 le nombre de pratiquants continue à progresser. Le niveau général augmente. Sur le plan technique, les voiles se spécialisent, permettant des enchaînements incroyables que maîtrise de plus en plus de monde. De jeunes pilotes talentueux progressent à une vitesse incroyable et atteignent un excellent niveau en quelques années.

Mais l’organisation de la voltige s’essouffle. Les organisateurs peinent à financer leurs évènements. Les championnats du monde prévus en 2008 en Norvège sont annulés au dernier moment. En 2010 même scénario: l’Italie annule les championnats du monde quelques mois avant la date prévue.

Pourtant le niveau des pilotes ne cesse d’augmenter. Mais il faut désormais être un spécialiste pour remarquer les infimes différences qui séparent les meilleurs. Le public n’est plus aussi nombreux à venir admirer le spectacle.

Le règlement évolue : afin de privilégier la diversité, il est désormais pénalisant de réaliser deux fois la même manoeuvre au cours d’une compétition. Du coup les pilotes, notamment le Hongrois Pal Takats, inventent de nouvelles manoeuvres et de nouveaux enchaînements de manoeuvres : Anti Rythmique, Esfera, Corkscrew, Cowboy et Joker (vous trouverez la description de ces manoeuvres dans la page suivante).

Une nouvelle génération de pilotes arrive en équipe de France : on y trouve Eliot Nochez, Théo De Blic, François Ragolski, Tim Alongi ou encore Gaetan Doligez. La FFVL se dote d’un entraîneur national avec François Bon et organise des entraînements pour ses athlètes ainsi que des stages afin de déceler et former les futurs compétiteurs. Depuis 2012 cette équipe est au plus haut niveau international.

En 2012, sous l’impulsion de pilotes comme Théo De Blic ou l’espagnol Horacio Llorens, les pilotes apprennent à réaliser les manoeuvres avec un demi tour de twist volontaire ce qui leur permet de diversifier leurs programmes et d’obtenir des bonus en compétition. La voltige prend alors son aspect moderne.

Photo: Théo De Blic twisté en prise de vitesse…

 

2016 : Deuxièmes championnats du monde FAI.

Il aura fallu attendre 10 ans avant de voir de nouveaux championnats du monde de voltige en parapente.

Le club des Chamois Volant organise la compétition sur le lac d’Annecy à la fin de l’été 2016. Pour ma part, j’assiste au spectacle en tant que speaker.

Le français François Ragolski est consacré champion du monde dans la catégorie individuelle. 2ème Tim Alongi (France). 3ème Horacio Llorens (Espagne).

Pour la première fois une championne du monde est consacrée avec l’autrichienne Christina Kolb. 2ème Nicole Schmidt (Allemagne). 3ème Lea Haesenberger (Suisse).

Les espagnols Raul et Felix Rodriguez conservent leur titre de champion du monde dans la catégorie synchro.

Video: les 2ème championnats du mode de voltige en parapente, la voltige moderne !

 

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