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Incidents de vol et plan de réactions /2

 

Les clefs et les cravates

 

CRAVATE-jolie

 

Parmi les problèmes susceptibles d’engendrer des rotations involontaires nous trouvons les clefs et les cravates.

  • Une clef est un emmêlement des suspentes entre elles ou avec une brindille par exemple. Un nœud s’est formé.
  • Une cravate est un emmêlement de la voile avec les suspentes.

 

De tels incidents arrivent rarement en vol, même si ce n’est pas à exclure suite à une grosse fermeture par exemple. Bien souvent, les clefs ou les cravates se forment au moment du gonflage de la voile au décollage. Une mauvaise préparation  en est souvent la cause (tri et démêlage des suspentes, mise en place de la voile). Les suspentes fines et les suspentes non gainées sont plus propices à ce type de problèmes.

 

Il est normal d’avoir un jour ou l’autre une clef ou une cravate au gonflage.

Il est anormal de se retrouver en vol avec!

 

C’est une grosse faute de pilotage !

Je vous rappelle qu’après le gonflage, le pilote doit vérifier (entre autres) que tout le suspentage est en ordre avant de prendre la décision de décoller. Ce contrôle doit être visuel car sur les seules sensations, le pilote peut ne pas s’apercevoir du problème. Il faut avorter son décollage en cas de clef dans les suspentes ou si une cravate de bout d’aile s’est formée !

Il vaut mieux regretter de devoir à nouveau tout préparer, que regretter d’être en vol avec un problème difficile à résoudre et qui peut fortement perturber la manœuvrabilité de la voile! Malheureusement, il est possible de se retrouver un jour en vol avec une clef ou une cravate qui risque d’engendrer une rotation involontaire.

 

Dans 90% des cas, si vous avez réussi à décoller avec votre problème, c’est que vous pouvez voler!

 

 

Comment réagir?

Comme nous venons de l’apprendre, il faut, dans l’ordre:

  1. contrer et prendre le bon cap
  2. identifier le problème
  3. tenter de résoudre le problème ou aller se poser avec le problème

 

 

Durant toutes ces opérations, la priorité est de naviguer correctement. Pour cela il faut toujours regarder son environnement.

 

Identifier le problème

Lorsque vous êtes sur le bon cap et que vous vous êtes éloigné du relief, il se peut que vous ayez le temps de procéder à une analyse du problème. Étant donné qu’il faut principalement regarder devant et autour de soi, il faut une technique pour regarder la voile.

 

La technique des coups d’œil:

 

2 secondes maximum!

 

Quand on observe autre chose que son environnement, il  ne faut pas focaliser son regard trop longtemps. Car pendant ce temps, on perd le visuel sur le cap, les autres aéronefs etc. Jeter un coup d’œil c’est regarder rapidement et brièvement: deux secondes maximum! Puis il faut regarder à nouveau devant soi. C’est valable pour identifier un problème sur la voile, comme pour regarder ses instruments ou faire des manipulations. Bon d’accord, on peut parfois regarder un peu plus longtemps… mais alors 5 secondes maximum pour les situations faciles. Jamais plus! Il faut répéter plusieurs fois de suite ces coups d’œil afin de progressivement trouver d’où vient le problème… Portez votre attention sur les suspentes mais aussi sur la voilure (on repère vite une partie de voile déformée).

 

Les cravates

Une cravate est un problème bien différent d’une simple fermeture. La voile reste emmêlée dans les suspentes.  Il y a encore quelques années en arrière, ce problème concernait surtout les pilotes équipés de voiles relativement allongées. Mais avec la généralisation des renforts de bord d’attaque rigides (type joncs), les cravates sont de plus en plus fréquentes, même avec des modèles grand public.

 

La présence de joncs augmente le risque de cravate.

La présence de joncs rend les cravates plus difficiles à défaire.

 

Les cravates peuvent se former au décollage, mais aussi en vol suite à certaines formes de fermetures. C’est généralement le bout d’aile qui est emmêlé provoquant une traînée importante (bien plus importante qu’une simple fermeture comme une oreille). Cela provoque donc une mise en rotation qui peut s’avérer importante et le pilote doit s’efforcer de contrer (sellette et commande) pour maintenir un cap et continuer à naviguer.

 

Une cravate, même petite, provoque plus de mises en rotation qu’une simple fermeture.

Il ne faut pas négliger le pouvoir d’autorotation d’une toute petite cravate!

 

 

Décravater

Il n’est pas toujours possible de défaire une cravate. Mais il faut essayer!

Le simple fait de contrer peut parfois suffire à rouvrir la cravate.

Une mise en virage franche côté extérieur à la cravate peut également participer au décravatage en modifiant l’attaque des filets d’air sur la cravate.

 

Il y a 3 techniques à connaître:

tirer et relâcher la suspente de bout d’aile

fermer et rouvrir l’oreille

réaliser un bref décrochage asymétrique

 

Les deux premières techniques sont faciles et abordables pour tous les pilotes.

La troisième technique, le décrochage asymétrique, est plus délicate. Nous en reparlerons dans la 3ème partie de ce manuel (ici).

 

La suspente de bout d’aile

Il est possible de tenter de défaire une cravate en agissant sur la suspente de stab (ici). Cette dernière agit comme un fil d’Ariane. En tirant sur la suspente, le bout d’aile prend le chemin du retour. Du moins des fois.

Suspente-de-stab

 

Il faut tout d’abord identifier la suspente de stab. En fait il vaut mieux l’avoir identifiée avant! Le pilote doit être capable de la trouver rapidement sans hésitation. Il faut donc apprendre à la repérer et s’entraîner à la saisir, un peu comme une oreille. Il faut remarquer que lors d’une cravate, cette suspente mais aussi ses voisines risquent d’être détendues et de flotter au vent. Il ne sera pas aussi facile de l’identifier que lorsque tout est bien en ordre.

Il faut la saisir le plus haut possible.

tirer-suspente-de-stab-1

 

Il faut tirer et relâcher!

Des coups secs! Les gestes peuvent parfois être très amples.

Il faut donc souvent lâcher la poignée de frein pour pouvoir tirer la suspente sans tirer sur les freins.

Il faut souvent ravaler la suspente en faisant coulisser la main le long de la suspente. Car il n’est pas possible de tirer sur tout l’élévateur.

tirer-suspente-de-stab-2

tirer-suspente-de-stab-3

 

Relâchez la tension et laissez du mou, mais sans lâcher la suspente afin de pouvoir recommencer.

Il est conseillé d’être équipé de bons gants en cuir pour pouvoir faire coulisser la main sur la suspente sans se brûler.

 

Vidéo: 2 minutes 10 secondes, décravater avec la suspente de stab (merci à P’tit Pierre pour ces images!)

 

Morphologie du pilote et accès à la suspente de stab

Un pilote de petite taille, avec de petits bras, peut avoir de la difficulté à accéder à sa suspente de stab. Surtout s’il est équipé d’une sellette avec des points d’ancrage hauts et de longs élévateurs. D’autant qu’en cas de cravate, il faut souvent contrer à la sellette ce qui ne facilite pas la saisie de la suspente. Ne pas réussir à saisir sa suspente de stab est un vrai handicap pour le pilotage. Un peu comme si vous ne pouviez pas freiner à fond sur votre voiture parce que vos jambes sont trop courtes.

 

Mon conseil: équipez-vous d’un “kit de décravatage”!

Il s’agit de réaliser un petit bricolage. Il est vivement recommandé de faire réaliser des travaux par un professionnel bien équipé, mais un bricolage “maison” est tout à fait possible, à vos risques et périls. L’idée consiste à placer une petite poulie sur la suspente de stab. Cette poulie doit être reliée à une petite cordelette, suspente, ou sangle. La cordelette est reliée à une petite commande (une boucle, un anneau…) qui vient se fixer sur les élévateurs, à un endroit facilement accessible, par exemple sur les arrières. Un velcro paraît idéal pour fixer l’anneau aux élévateurs.

 

 

Il est aussi possible de fixer directement  la cordelette en bas des élévateurs. Un simple nœud fait parfaitement l’affaire. Ce deuxième montage est plus économique, mais attention à ce que la cordelette ne flotte pas trop au vent à côté de l’élévateur. Il faut que le système soit bien réglé, cordelette relativement tendue.

 

 

 

Fermer / rouvrir l’oreille

Une deuxième solution consiste à fermer le bout d’aile concerné en faisant une petite oreille non maintenue. La fermeture provoque une attaque des filets d’air différente sur la voilure. Cela détend les suspentes. Avec un peu de chance ça marche du premier coup. Si non, il ne faut pas hésiter à recommencer.

Avec un kit oreille c’est facile.

faire-oreille-kit-oreille

 

Sans kit oreille, la technique est la même que pour tirer la suspente de stab: il faut d’abord ravaler la suspente avant extérieure pour pouvoir lui tirer dessus sans tirer sur les autres avants (ce qui causerait une fermeture trop grosse).

 

faire-oreille-1

 

faire-oreille-2

 

Il faut parfois alterner ces deux techniques. Mais toujours en gardant la priorité au cap et à la navigation!

 

Vidéo: 2 minutes 18 secondes, 5 exemples de décravatage

 

Vous avez remarqué qu’il faut parfois se battre. Mais tout en conservant le contrôle de sa direction. Car il serait bête de défaire une cravate et de se retrouver dans une situation pire encore: trop bas pour rejoindre le terrain, sous le vent du relief, emmêlé à une autre voile ou encore accroché dans une ligne électrique. Priorité au cap!

Il faut aussi savoir renoncer et aller se poser…

Nous reparlerons souvent des cravates car c’est une complication fréquente (ici).

 

Notre plan de réactions peut donc évoluer avec nos 3 techniques pour résoudre les cravates.

 

 

Les clefs

On parle de clef pour évoquer un emmêlement des suspentes entre elles formant un nœud. Il est parfois possible de réussir à défaire la clef. Mais le plus souvent tous nos efforts seront vains, et toute action pour tenter de défaire le nœud n’aura comme triste conséquence que de le serrer davantage.

 

Les conséquences d’une clef

Les suspentes emmêlées ne travaillent plus comme elles le devraient (la longueur et la direction sont modifiées). Cela provoque une déformation de la voile. Si la déformation est minime, elle ne perturbe que très peu le comportement de l’aile. Mais si la déformation est conséquente, les problèmes commencent. La plupart du temps, les clefs provoquent une rotation plus ou moins importante de la voile. Ça ne vole pas droit… C’est souvent ainsi que l’on s’aperçoit du problème.

 

Tenter de défaire une clef en vol?

 

Vos chances de réussite sont faibles. Vous pouvez essayer de suivre les instructions qui suivent, mais il faut aussi savoir renoncer et aller se poser calmement.

 

Pour tenter de défaire la clef, il faut analyser finement le problème c’est à dire identifier quelles sont les suspentes impliquées dans le nœud.

 

Lorsque les suspentes de frein sont emmêlées

Il est important de vérifier si la clef implique des suspentes de frein car cela modifie l’action du freinage et peut rendre la commande inutilisable. C’est à dire que toute action à la commande augmente les déformations sur la voile et risque de provoquer un décrochage. Si les suspentes de frein sont emmêlées entre elles (sans impliquer d’autres suspentes), il va être difficile et délicat de tenter de défaire la clef. Vous pouvez essayer de brefs « coups de frein » : une action à la commande avec peu d’amplitude (15 à 30 cm) mais une vitesse de freinage radicale suivie d’un retour instantané à la position « bras hauts ». Si la clef ne se défait pas, n’insistez pas et allez vous poser. Si la clef rend toute action de freinage impossible ou dangereuse, vous pouvez piloter à la sellette et aux élévateurs arrière. Si la clef implique des suspentes de frein et d’autres suspentes (les arrières par exemple), vous pouvez essayer la technique des petits coups de frein. Vous pouvez également solliciter la suspente arrière basse correspondante (quitte à venir la saisir avec la main extérieure au problème) et alterner : frein, suspente basse, frein, suspente basse… Une fois encore, si cela ne fonctionne pas, il convient de ne pas insister et d’aller tranquillement se poser.  

Avertissement : une action brutale pour tenter de défaire une clef pourrait conduire à la rupture d’une ou plusieurs suspentes. En effet, selon le nœud, vous risquez de provoquer des frottements importants donc un réchauffement brutal de la suspente qui anéantit la résistance des matériaux. Attention donc à ne pas abuser de la force!

 

Lorsque la clef implique d’autres suspentes que celles de frein

Il est possible d’intervenir sur les suspentes basses correspondantes. Il peut être nécessaire d’utiliser les deux mains pour «tirer » alternativement sur deux suspentes. Attention, la voile ne tolère pas beaucoup d’amplitude de traction sur les suspentes (A, B, C, D). On parle ici d’actions de quelques centimètres (2 à 5cm) obtenues avec un mouvement sec du poignet et immédiatement relâché.

Tirer sur les suspentes avant peut provoquer une fermeture frontale. Tirer sur les suspentes B s’avère très physique. Tirer sur les arrières, ralentit la voile (mise en virage ou risque de vrille).

 

Lorsque la clef se trouve très proche du bout d’aile

Le pilote peut tenter de défaire le nœud en réalisant une petite fermeture asymétrique (comme pour faire les oreilles mais d’un côté seulement). Les suspentes se détendent et se mettent à bouger dans tous les sens… Avec un peu de chance cela va défaire le nœud. Si à l’ouverture de l’oreille, le problème est toujours là, il est possible d’essayer de passer en force en alternant : oreille, réouverture, oreille, réouverture… Encore une fois, il ne sert à rien d’insister, si le nœud est bien ficelé il va falloir poursuivre le vol ainsi! Dans ce cas, faire les oreilles (symétriques cette fois) peut être une solution pour retrouver un comportement connu.

 

Lorsque la clef se trouve près du bord de fuite

Si la clef se situe vers l’arrière, elle provoque un ralentissement de l’aile. Le risque est alors de provoquer un décrochage. Il peut être utile de rendre la voile plus piqueuse en utilisant votre accélérateur.

 

 

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